Etats-Unis . 2006 . 2h10. couleur . VOSTF
avec Natalie Portman, Hugo Weaving, Stephen Rea
Mardi 16 à 14h00 : Rencontre au manège avec David Llyod (le dessinateur de la bande dessinée V pour Vendetta), et Juszezak (auteur de bande dessiné, notamment Oki, souvenirs d’une jeune fille au pair).
Ce film est l’aboutissement d’une histoire commencée il y a vingt ans, au temps de Margaret Thatcher, par la publication d’une bande dessinée dont les auteurs, Alan Moore (scénario) et David Lloyd (dessin), s’inquiétaient de la dérive autoritaire du régime conservateur. Publié pour la première fois en 1981, V pour Vendetta s’appréhendait comme une réflexion dense et brillante sur la solution anarchique dans un hypothétique Royaume-Uni fasciste. Par ce contexte futuriste, Moore fustigeait le pouvoir Thatchérien et le danger pour un peuple de privilégier la sécurité à la liberté. Pour les frères Wachowski (Matrix), scénaristes, et pour Mc Teigue, réalisateur, le propos fait tout aussi bien références à l’histoire et la littérature, mais encore à l’actualité récente et menaçante. Car ce peuple soumis dans cette Angleterre futuriste vit dans un monde de mensonge, de show télé, de propagande, de surveillance, de doute... Et la souffrance de ce peuple est très exactement la peur : peur de la police qui surveille la rue le soir, peur des terroristes qu’on montre a la télé... Doute qui vous envahit devant les infos où l’on ne sait pas si ce qui est dit est vrai ou faux... Doute lorsqu’un gouvernement échappe au contrôle des citoyens. Peuple en attente donc. En attente d’une révolution qui ne vient pas ! Et si V s’offre en génial libérateur, en un presque sur-homme, c’est aussi un être paradoxalement froid et sensible, voire inquiétant. Certes, on se dit que V se trouve du côté de la Justice, mais ses méthodes sont très ambiguës, voire identiques à celles du pouvoir en place. V porte un masque rieur, soit, mais est-ce à dire que V est un sauveur joyeux ou un terroriste ironique ? Et que veut-il ? La justice, la liberté, ou l’anarchie ? Ou bien seulement la vengeance, la vendetta ? Une chose est sûre, V tue, et V détruit les symboles d’un état oppresseur. V est-il réellement un ’gentil’, ou ses desseins complexes cachent-ils quelque horrible dénouement ? Cette dualité, ce refus du manichéisme est une vraie qualité du film : bien qu’usant de violence avec modération, V pour Vendetta est dérangeant dans la mesure où le film appelle à la révolte. Mais peut-être n’est-ce qu’un appel à la prudence ?… "Les citoyens ne devraient pas avoir peur de leur gouvernement. C’est le gouvernement qui devrait avoir peur de ses citoyens !" Moore et Lloyd n’ont jamais souhaité voir leur œuvre portée à l’écran mais ils n’ont pas eu vraiment le choix puisque V est la propriété de Vertigo/DC Comics. Néanmoins voir le film de McTeigue donne très très envie de (re)lire l’œuvre originale.